Qui se cachait sous le
pseudonyme du baron de Richemont ?
Parmi
les prétendants au titre de Louis XVII, le baron de Richemont est
absolument à part, parce qu’il était riche et ne cherchait
pas à vivre aux dépens de gens crédules, parce qu’il
bénéficiait de hautes protections surprenantes et parce que la
police n’a jamais réussi à percer son pseudonyme. Il s’agit
bien d’un agent secret en mission, d’un James Bond. Ainsi ne
s’étonne-t-on pas trop de le voir à Lyon, sous le nom du Colonel
Julien, pousser les canuts à la révolte. C’est aussi le
seul prétendant à avoir eu l’honneur d’être reçu par le pape
en audience privée durant deux heures. Pourtant, la décoration,
qu’il ne craignait pas d’arborer sur ses portraits, l’Ordre
de la Toison d’Or selon Madame Jacqueline Ducassé, dans Louis
XVII et ses agents politiques d’après des documents inédits,
p. 14 (1984, chez l’auteur Le Marquisat, 47390 Layrac), livre qui,
malgré son titre, est consacré au baron de Richemont, lui avait
été remise par l’Empereur d’Autriche dans les armées duquel
il avait servi avec les émigrés contre la France et contre la
Révolution : elle aurait pu conduire à percer son secret,
mais elle n’a jamais fait l’objet d’études. La police,
op. cit ; p. 123 et 139, , avait déjà eu des doutes et
s’était intéressée aux agissements du marquis de
Bourbon-Conti qui cherchait à joindre le fils Courtois
susceptible d’avoir des documents intéressants et désirant
interroger, par l’intermédiaire de l’abbé Veyron Madame de
Monteymart au sujet des fouilles deu cimetière de Sainte
–marguerite. Madame la marquise de Monteynart était la fille d’un
intime de Louis XVIII, son ancien maître de cérémonies le marquis
de Dreux-Brézé. Après son évasion de Sainte-Pélagie en 1834, le
baron de Richemont se rendra au château de Tencin, au nord-est de
Grenoble, où , ainsi que le raconte dans ses Mémoires,
Sosthène de La Rochefoucauld Doudeauville, la châtelaine au baron
de Richemont qu’elle avait connue sous son nom véritable de
marquis de Boubon-Conti accordera l’hospitalité et le présentera
à l’abbé Veyron, curé de Goncelin son voisin qui deviendra l’in
des correspondants les plus réguliers du baron. Lorsque le baron de
Richemont parle de l’accueil que lui réserve son royal cousin
lorsqu’il arrive dans la principauté de Modène, il faut se
rappeler que le marquis de Bourbon-Conti était effectivement le
cousin du prince d’Este-Modène. Celui-ci appartenait à la maison
de Bourbon-Conti (son père était Louis François Joseph,
1734-1804). De même pour ses aventures à Rio de Janeiro où le
prince Juan , fils de Pierre de Bourbon-Bragance mort en 1812 à Rio
de Janeiro, est bien le cousin du marquis de Bourbon-Conti., alias le
baron de Richemont. Il avait aussi été décoré en 1815 par le roi
d’Espagne (encore un parent !) de l’Ordre de Charles III
en qualité d’officier d’état –major du duc de Bourbon.
En 1815, il fut également décoré
de l’Ordre de Saint Louis de Malte par Louis XVIII.
Madame
Jacqueline Ducassé a présenté une hypothèse séduisante, dont
nous nous inspirerons librement. Selon elle, ce n’est pas, -bien
entendu, - le dauphin Louis XVII échappé du Temple, puisqu’il
n’avait pas les yeux bleus comme celui-ci mais noirs ; ce
n’est pas non plus , comme le voulait Louis Veuillot et comme la police qui avait été abusée par l'existence d'une famille
Perrin de Richemont à Saint-Domingue avant la Révolution, le fils d’un
boucher de Lagnieu dans l’Ain (près de Belley), Claude Perrin,
clerc de procureur et faussaire, mais un prince du sang, cousin de
Louis XVII, savoir François Claude Fauste, marquis de
Bourbon –Conti ou marquis de Rémoville, fils de Louis
François de Bourbon- Conti Ier (1717-1776) et de sa maîtresse
Marie-Claude Gaucher –Dailly, dite Madame de Brimont
(de Brimont dans la Marne, près de Reims), née vers 1745. Fauste
Louis est né le 21 mars 1771 à Gonneville -lès- Rouen et il a
été baptisé le 21 mars1773 à Saint-Pierre de Gonneville -lès-
Rouen. Il a été doté du marquisat de Rémoville près de
Neufchâteau dans les Vosges et a eu deux morts et deux sépultures,
on le verra, la première officielle en 1833, l’autre réelle en
1853 à Gleizé dans le Rhône près de Villefranche. Il avait été
reconnu par son père et, à la Restauration, son frère Félix et
lui furent accueillis comme parents par Louis XVIII. Ils avaient eu
leurs terres confisquées sous la Révolution et , par lettres
patentes du 17 novembre 1815, le roi les avait rétablis dans leurs
titres ; l’ordonnance du 29 avril 1824 les confirme dans
leurs titres sous condition que les lettres patentes constitutives
leur seraient délivrées dans les deux mois , -ce qui fut fait
, mais seulement pour le cadet . L’aîné dont on ne savait rien
ne reçut pas ces lettres patentes.
Un
indice : le sceau du marquis de Rémoville.
Le
marquis de Rémoville possédait à la fois un cachet à aigle
(Rémoville) et, en tant que Prince du sang, un cachet à fleur de
lis. .Son identité avec Hébert et avec le baron, de Richemont est
confirmée par le fait que Hébert touchait de l’argent chez son
banquier Clavelan en utilisant son cachet à aigle pu son cachet à
fleur de lis (en ce dernier cas l’argent venait du trésor royal
de France, ce qui est étonnant , mais peut s’expliquer par le
fait qu’il était colonel et touchait une pension.
Or,
en 1834, le 26 octobre, devant la cour d’assises de la Seine,
l’avocat général déclare : « un individu se nommant
Hébert âgé de 46 ans qui maintenant dit se nommer Baron de
Richemont et être enfant naturel appartenant à une famille
distinguée et étrangère et que l’honneur lui défendait d’en
dure davantage (on remarque la présentation de Louis XVII comme le
fils adultérin du suédois Axel de Fersen et de l’autrichienne
Marie-Antoinette) avait, avant la révolution de 1830, élevé la
prétention d’être Louis XVII . Il faisait valoir ses
prétendus titres dans des publications et écrits. On suppose que
Richemont en est l’auteur, mais la calligraphie est de la main de
Colliard [un imprimeur parisien], celui précédemment employé par
Hullin, impliqué dans le premier procès de la Société des Droits
de l’Homme.…. Il cherche à exciter certaines gens et à lever
une milice. Le 18 juillet, il passe chez Coquardon pour prendre
ses cachets dont un à aigle. On lui trouve un autre cachet à
fleur de lis. On a saisi chez lui une correspondance chiffrée, qui a
été traduite par des experts et qui provient de son principal
agent, la femme Duru. On a saisi chez lui une espèce de presse et un
poignard. »
L’histoire de ce cachet mérite d’être contée. En janvier 1792,
Crawford, cité dans Louis XVII, p.19, écrit : « Ce
jour là, la reine, remarquant une pierre gravée que j’avais au
doigt, me demanda si j’y étais bien attaché. Je lui répondis que
non. « Je vous le demande, me dit-elle, car si j’avais besoin
de vous écrire de ma main, le cachet vous servirait
d’indication. » Cette pierre représentait un aigle
portant dans son bec une couronne d’olivier .Sur quelques
mots que ce symbole me suggéra, elle secoua la tête en me disant :
« Je ne me fais pas d’illusion, il n’y a plus de bonheur
pour moi. », puis , après un moment de silence, « le
seul espoir qui me reste, c’est que mon fils pourra du moins
être heureux. »
Avant
le 10 août, « Monsieur de Goguelat, … se trouvant auprès de
Sa Majesté, elle lui donna cette bague en disant : « Si
vous voyiez jamais Monsieur Crawford, vous la lui remettrez de ma
part. » Son intention a été remplie, Monsieur de Goguelat me
l’ayant remise à Vienne », avec en note : « J’ai
perdu cette bague avec d’autres effets qui m’ont été volés
chez moi. »
La
fratrie du baron
Il
eut pour frère Félix, comte de Bourbon- Conti (1772-1840),
chevalier d’Hattonville (Allainville) dans les Yvelines et
de Groslieu (manoir de Groslieu à Allainville ), fils
également de Madame Gaucher- Dailly. Sosthène de La Rochefoucauld
Doudeauville possédait une terre voisine de Hattonville et il épouse
la veuve du chevalier de Hattonville, Herminie de la Brousse de
Verteillac, ce qui explique le chapitre élogieux consacré au baron
de Richemont (vol. XII) dans ses Mémoires : il
connaissait l’identité du baron à cause du voisinage de son frère
et de sa veuve.
Il
eut pour demi-frère Louis François Véronèse, dit le chevalier ,
puis le comte de Vauréal, fils de Marie –Anne Véronèse
et de Louis François de Bourbon-Conti Ier, né à Paris en 1761 et
mort à Melun en 1785. Sa veuve, la comtesse de Vauréal, nous
intéresse, parce que Madame Ducassé ( op. cit. p.146) a
découvert une lettre de Richemont de 1842, dans laquelle il adresse
ses amitiés à « Madame la Comtesse de Vauréal ainsi qu’à
sa famille », à sa demi- belle- sœur., ce qui confirme
l’identité du baron.
Quelques
mots d’une intéressante demi-sœur, Stéphanie de Montcairzin
de Bourbon- Conti. Il faut lire ses Mémoires historiques
(1798, édition de 1986), à la fois chef-d’œuvre littéraire
rédigé par cette élève de Rousseau et autobiographie exacte et
passionnée. Cette demi-sœur du baron de Richemont, Amélie
Gabrielle Stéphanie- Louise, appelée de Montcairzin, par
allusion au nom de son père Conti et à celui de sa mère, la
duchesse de Mazarin, est née en décembre 1762 à Paris, paroisse de
saint-Eustache. Elle ne sera baptisée que beaucoup plus tard, le 7
octobre 1788, op. cit. p.160, à l’abbaye Saint-Antoine à
Paris, avec pour marraine Madame de Gimel de Lentillac, abbesse de
l’abbaye royale de Meaux. Elle a été reconnue par son père et
légitimée par Louis XVI, protégée par Monsieur, puis nommée
surintendante de la maison de la reine par Louis XVI dans les
derniers jours de celui-ci. . Elle a été victime d’un complot
odieux ourdi par son frère légitime et par sa mère pour la
déshériter de la plus grosse part de sa fortune. Sa mère, la
comtesse de Mazarin, est la fille de Hortensia Mancini, une nièce du
cardinal et elle avait épousé en 1661 Armand Charles de Meilleray,
duc de Mazarin dont elle eut des enfants légitimes : c’est
pour avantager ces enfants légitimes et peut-être aussi pour
dissimuler son adultère qu’elle unit ses efforts à ceux du seul
fils légitime du Prince de Conti, issu du mariage du Prince de
Conti (1716-1736) et de Louise d’Orléans, savoir le peu
intéressant comte de la Marche, Louis François II de Bourbon-
Conti (1734-1814) .
Le
prince de Conti, se méfiant de son fils et de son ex-maîtresse,
obtient la légitimation de Stéphanie par le roi, Mémoires
historiques., p.52 : « ainsi est ma volonté
de reconnaître et de légitimer la fille de M. le prince de Conti,
âgée de onze ans et ayant élevée, de mon consentement, sous le
nom de comtesse de Mont-Cair –Zain, à
laquelle qualité elle peut ajouter, dès ce jour, le titre d’altesse
sérénissime, légitimée princesse du sang ; les honneurs du
Louvre lui sont accordés, et je me réserve, ainsi que son père, de
lui faire l’apanage nécessaire à son rang ; signé LOUI S».
Cet acte semble sonner le glas des espérances de sa mère et de
son frère légitime, qui se voient obligés de partager avec elle
l’important héritage du prince. Ils mettent au point un
complot machiavélique. Ils fabriquent un faux acte de décès, à
Viroflay, de Stéphanie, op. cit. p. 73, en date du 7 juin
1773. Dans cet acte, les faussaires vont même jusqu’à
reconnaître que cette comtesse de Mont Cair-Zain était
légitimée princesse du sang et fille de Louis François de Bourbon
–Conti, ce que contestent pourtant les détracteurs de la
princesse, comme le comte de Barruel –Beauvert dans son ouvrage
Histoire de la prétendue princesse de
Bourbon-Conti. Ils la font enlever le jour prévu pour la
présentation au roi, avec la complicité de son « institutrice
« » privée, Madame Delorme, la droguent pour la marier à
Viroflay avec un procureur de Lons-le- Saulnier, un dénommé
Billet, intéressé par la dot laissée à Stéphanie à défaut de
l’héritage auquel elle avait droit. Le procureur n’était pas
regardant et désirait consommer le mariage alors que Stéphanie
n’avait que onze ans et s’y refusait absolument, Ils usurpent
l’identité de Anne Louise Françoise Corméo,fille d’Etienne
Corméo et de Madame Delorme (nom qui n’était que le pseudonyme de
Grillet épouse Martin) , née le 30 juin 1756 à Saint-Sulpice,
et marient à Viroflay, le 18 janvier 1774 , avec un procureur
complaisant et cupide de Lons-le-Saunier, appelé Billet, la pseudo-
Louise Françoise Delorme, prétendument née à Saint-Sulpice le 30
juin 1756, op. cit. p.105-106. « On mariait une fille
de Madame Delorme et Madame Delorme ne comparaissait pas plus dans
l’acte de ce prétendu mariage qu’elle n’avait comparu au
contrat quelques jours auparavant ; on mariait Anne Louise
Françoise Delorme ; ce n‘était donc pas moi ; je
n’étais donc pas mariée ; car j’étais et je suis Bourbon-
Conti. », s’indigne Stéphanie,op. cit. p.106.
Ils
éliminent tous ceux dont ils craignent les révélations,
empoisonnant Madame Delorme, éliminant un garçonnet de 12 ans qui
s’était attaché à Stéphanie, par peur qu’il ne parle. Sous la
Révolution, ils paieront une prostituée demi-folle, Marie Rosine
Mornay demeurant rue Sébastien- Pont- aux- Choux quand elle n’est
pas enfermée à l’hospice d’aliénés de Sainte-Pélagie, op ;
cit. , p.214 afin de lui faire usurper le nom et le rôle de
Stéphanie. Ils réussissent ainsi à la discréditer auprès du
comité révolutionnaire qui l’avait autorisée à pénétrer au
Temple et à rendre visite à la sœur du dauphin. Il est curieux de
voir des historiens épouser le parti de son frère légitime sans se
donner la peine de vérifier ses affirmations, peut-être parce
qu’elle est réellement princesse du sang et se revendique comme
telle, et déclarant son mari forcé, le procureur de
Lons-le-Saulnier, indigne d’elle et de son sang. J’ai voulu
vérifier quelques détails de son récit : elle parle du lieu de
Faille près du canal d’Orléans au château du prétendant de
Madame Delorme, M. Jacquet. Il s’agit de Fay- aux- Loges (Loiret)
et la famille Jacquet est présente à Fay (prononcé faille)
dès 1694.
Autre
détail : op. cit. , p.145, Stéphanie cite par sa seule
initiale B… un complice de son mari qui, à Lons-le-Saunier,
chercha à l’outrager. Il s’agit du comte Barruel- Beauvert qui,
en 1811, publia , pour se venger du soufflet qu’elle lui avait
administré en présence de son pseudo-« mari »,une
Histoire de la prétendue
princesse Stéphanie de Bourbon- Conti, -in-8°, que
Napoléon fit mettre au pilon immédiatement, mais dont certains
historiens s’inspirent. .
Les
revenus du baron de Richemont
Le
baron de Richemont était colonel et avait donc droit à cette
pension du trésor royal qu’il touchait avec son sceau fleudelisé.
, à Rouen par exemple, et de plus il avait des revenus personnels
qu’il touchait avec son sceau à l’aigle Aux Archives Nationales,
Bora archives privées, T170 papiers Rémoville et Hattonville, nous
apprenons que le marquis de Bourbon –Conti avait été , comme son
frère , ancien élève de la Marine et pupille de l’avocat au
parlement Charles Louis Clausse. Du dénombrement de leurs biens, je
retiens concernant le marquis de Rémoville , outre le fief vosgien
de Rémoville près de Neufchâteau et un hôtel parisien situé rue
d’Artois partagé avec son frère, le Mesnil-sur-Vair et
Auvillet, ainsi que , tous près de Neufchâteau, Aouze, Balléville
, Viocourt ,Tilleux, Certilleux, Aroffe , Jainvillotte et Soncourt
. Le cadet, sans postérité, avait des biens en Essonne :
Morigny-Champigny.Corbreuse, et , dans les Yvelines Groslieu
(Allainville) et Hattonville (Allainville dans les Yvelines).
La
famille proche du baron
Son
héritière, née le
4 septembre1833 à Paris dans le 8 e arrondissement, est
Melle Louise Charlotte
Virginie Worff, qui porte le nom de sa nourrice. Il avait trois
autres filles : l’aïnée épousa le comte de Riccio, une
autre le Comte hongrois de Goritz, neveu du comte Batthiany, une
troisième un basque M. Iturbide. Marie-Antoinette de France (Marie
Manczer) me semble être plutôt la fille de l’ancien tambour de
Belgiojoso.
A
noter que le baron touchait 1200 francs par an de Madame veuve
Picqué de Strasbourg, qui se disait veuve du professeur de dessin
de Louis-Charles, duc de Normandie et habitait 12, rue de Condé, 6e
, à Paris, où résidait aussi le baron. Son exécuteur
testamentaire était le médecin.Louis Balthazar Caffe, , demeurant
49, rue de la Ferme des Mathurins, 8e, ., fils de Louis
Charles Caffe qui avait tenté de sauver la reine à la
conciergerie..Melle Worff avait pour curateur Joseph Chevrier,
négociant, habitant 16 rue Thévenot (aujourd’hui rue Réaumur, 2e
arrondissement).Louis Balthazar Caffe, chevalier de Saint Louis, et
fils d’un sénateur de Chambéry, avait participé, en automne
1793, avec Michonis , Pierris et Marino, à un complot destiné à
faire évader la reine (Madame Ducassé, op. cit., p.52)
Le
pseudonyme du baron pour les intimes : o
Il
s’agit de l’hymne
antiphonique : O Virgo virginum, ô vierge des
vierges !que l’on chantait pendant les sept jours qui
précédaient Noël. Notre-dame du O se célébrait autrefois
le 18 décembre. C’était la fête de l’Expectatio Partus
Beatae Virginis Mariae ( l’attente de l’accouchement de la
bienheureuse Vierge Marie).Ce pseudonyme montre sa ferveur sincère.
Les
nom et prénoms de Richemont
Le
baron de Richemont a pris son nom de sa mère Madame de Brimont,
agrémenté d’allusions historiques à :
1)
Henry Tudor, duc de Richmond qui chassa l’usurpateur Richard
III qui avait assassiné ses neveux pour régner. Comment
entendre cette allusion ? Je crois qu’il s’agit d’une
allusion à Madame Royale, Marie-Thérèse, duchesse d’Angoulême,
héritière des grandes richesses de ses parents, fortune que
son oncle Louis XVIII convoitait. Selon les historiens allemands (cf.
Noëlle Destremau, agrégée de l’Université, Madame Royale et
son mystère, Nouvelles Editions Latines, 1990), elle aurait été
cloîtrée pour la sauver des menaces de Louis XVIII au château
d’Eishausen avec d’abord un tuteur suisse appelé Philippe Hans
Scharre , puis un tuteur flamand qui se fait appeler Vavel de
Versay et qui est en réalité Leonardus Cornelius Van der
Valck, né le 22 septembre 1769 à Amsterdam, mort à Eishausen
également le 8 avril 1845, ami de Rouget de Lisle , de Talleyrand
(Hitler , en publiant les archives secrètes autrichiennes, a
révélé qu’il était payé par l’Empereur et on a ses
bordereaux depuis 1803) et de Benjamin Constant. Les tuteurs sont
tous deux catholiques et Vavel est riche. La « comtesse
ténébreuse », ainsi que l’appellent les historiens
allemands, est morte le 28 novembre 1837 à Berggasten , en Saxe,
sous le nom de Sophie Botta, anagramme de Batz.
Qui est la personne substituée à Madame Royale ? Elle n’a
pas les yeux bleus de faïence comme la fille de Marie-Antoinette,
mais noirs. Louise Catherine Lambriquet est la fille naturelle
du comte de Provence, le futur Louis XVIII, et d’une Madame
Lambriquet qui avait été chargée d’éduquer Marie- Philippine,
dite Ernestine Lambriquet, fille naturelle de Marie-Antoinette
et de Fersen ( ?), blonde aux yeux bleus tendrement aimée de
Marie-Antoinette à qui elle ressemblait étonnamment, morte en 1813
à Paris. Marie-Antoinette l’appelait : « Ma
fille ». Ernestine aimait beaucoup sa demi-sœur Marie-Thérèse,
présumée la future épouse du fils de Charles X, l’ancien comte
d’Artois le duc d’Angoulême, -mariage sans postérité qui
arrangeait bien les choses. Ernestine pressentie pour jouer le rôle
dans la substitution refusa, tandis que sa demi-sœur l’accepta.
Voici ce que j’ai trouvé sur Ernestine dans G ; Lenôtre, La
fille de Louis XVI, p . 69 : Marie – Thérèse
« s’était intéressée, dès les premiers jours [de sa
détention au Temple], au sort d’une de ses compagnes d’enfance,
Melle Lambriquet, fille d’un serviteur de la famille Royale,
naguère attaché à la maison de Monsieur. On se renseigna :
Lambriquet avait été guillotiné ; sa fille avait disparu :
on ne pouvait pas découvrir sa retraite (Archives du département
des Affaires étrangères, Vienne, 364). Et une note : «
Jean Lambriquet, « valet de chambre de la ci-devant cour de
Capet et du ci-devant Monsieur », compris dans la fournée du
14 juillet 1794 (25 messidor an Ii), W.Wallon. Tribunal
révolutionnaire, V, p.34. Aussi, p. 101 : « « le
directoire rendit, le 27 novembre 1795, un arrêté en cette
forme : « Les ministres de l’Intérieur et des
Relations extérieures sont chargés …de nommer, pour accompagner
jusqu’à Bâle la fille du dernier roi , un officier de gendarmerie
décent et convenable à cette fonction, … de lui donner, pour
l’accompagner une jeune fille de son âge, nommée Lambriquet,
qu’elle désire emmener…. Signé Rewbell, président. » et
p. 110, note des Archives du département des affaires étrangères : «
L’empereur a demandé en outre, qu’il fût permis à la princesse
d’emmener avec elle une jeune personne avec laquelle elle a été
élevée et qu’elle affectionne particulièrement : cette
jeune personne se nomme Ernestine Lambriquet ; son père était
garçon de la chambre de Monsieur, il a péri dans le cours de la
Révolution : sa mère, morte il y a quelques années, était
femme de chambre de la princesse ; Mesdames de Mackau et de
Soucy ( 60 ans et plus, demeurant à Vitry-sur-Seine et souhaitant,
comme par hasard, le mariage de la princesse avec le duc
d’Angoulême, à ne pas confondre avec la fille de Madame de
Mackau, beaucoup plus jeune, habitant rue Favart à paris et qui a
été sous -gouvernante comme la précédente. Cette dernière est
belle-sœur de Bombelles qui a été ambassadeur en Portugal, et dont
on doit se méfier, Archives du département des Affaires étrangères,
Vienne, 364) ont pris soin de cette jeune personne, elles sauront où
elle est présentement. » Madame de Mackau sera jugée trop
âgée et on lui préfère Madame de Soucy qui sera de l’escorte,
mais on n’entend plus parler d’Ernestine qui a peut-être été
substituée à ce moment, avec la complicité de Madame de Soucy.
Un
acte de baptême suisse, à Aarberg, canton de Berne, en date du 21
mai 1796 (correction de Louis Hastier pour 1793, tertia,
d’ailleurs incorrect, dans l’original pour sexto [anno]),
indique la naissance le 2 mai d’une fille française, Anne Marie
Joséphine, du soi-disant médecin Joseph Thiollier : les historiens
allemands pensent qu’il s’agit de la fille de Marie-Thérèse,
conçue au Temple, et du baron de Batz . En effet, dans l’acte de
baptême de la fille, le père est mentionné comme Français, de
Lons-le-Saulnier, ville où Batz avait fait faire son passeport,
chirurgien-major de la légion de Wattenwill.Dans Marina Grey, Le
baron de Batz, p.148, nous apprenons que des royalistes
obtiennent avec l’aide du baron des sièges aux élections
municipales de Lons-le-Saulnier, natrif de Soleure. On le retrouve à
Dôle, à Poligny, à Nyon dans le canton de Vaud, ville natale de
son vieil ami suisse, le médecin Nathey. Il dispose d’un autre
passeport au nom de Muller, natif de Soleure en Suisse. Thiollier est
la métathèse de Thilorier, le nom de la femme de Batz. .Il est
curieux de voir un médecin appelé Thierry, métathèse parmi
d’autres de Thilorier, venir à la prison sans motif sérieux 91
fois.Selon Marina Grey dans Le baron de Batz, le d’Artagnan de
la révolution, p. 13, Batz épousera en 1808 son ancienne
maîtresse Michelle (ou Désirée comme elle voulait qu’on
l’appelât) Thilorier, la
fille d’un premier lit de Madame Thilorier : veuve de
bonne heure, Madame Thilorier avait épousé Jean-Jacques du Val
d’Eprémesnil. .
Pierre Vincent Benoist, p.180, banquier angevin, fondateur et
actionnaire prévarivateur de la Compagnie des Indes (il se fera
appeler Benoist d’Angers,où il a des intérêts dans les
ardoisières , puis Benoist d’Azy dans la Nièvre) , ami de longue
date du baron de Batz et trempant dans ses complots, est le financier
de l’entreprise. En 1793, il se rend en Louisiane pour y étudier
les possiblités d’investissements de la Compagnie des Indes et en
ramène des nègres et des négresses (de là le nègre aperçu en sa
compagnie par la veuve Simon aux Incurables et le fameux tableau
d’une négresse par sa femme Ghillermine de LavilleLeroux ( ce
curieux nom double vient de la commune de Le Loroux près de
Fougères, en Ille -et- Vilaine, en latin villa illud
oratorium,
ferme de l’oratoire au sens de chapelle,
devenu ville Loroux,
en « construction absolue » datant le
patronyme du XIIIe siècle,
c’est- à- dire sans la préposition de),
aujourd’hui au Louvre. De là aussi les rumeurs d’une présence
de l’enfant aux îles ou en Louisiane.
Le
plan du baron de Batz consistait à devenir le « protecteur »
(titre pris par Cromwell) de France en même temps que l’époux de
la future duchesse d’Angoulême. Jean-Paul Plataret (se disant
de Villeneuve), avoué à Privas, aurait épousé à Lyon cette fille
naturelle de Madame Royale. Lorsque Louis XVIII, après avoir reçu
une dénonciation du baron, aura
connaissance
la paternité de Batz, il lui enverra l’ordre de se suicider ,
qui ne provient pas du faux sur sa date de naissance , bien
négligeable et qui ne concernait pas réellement « l’honneur » .
En
somme, le baron de Richemont, à travers son nom de Richemont, accuse
Louis XVIII d’avoir, comme Richard III, éliminé la véritable
duchesse d’Angoulême pour régner. La duchesse d’Angoulême,
évoquant « l’affaire du médecin » se plaindra
du chantage exercé par le médecin (Thiollier), grâce à la
naissance de Suisse, l’obligeant à payer alors qu’elle n’est
pas la véritable duchesse.
2)
Arthur III, comte de Richmond (en Angleterre), comte de
Gien et duc de Normandie
(1303-1458), le titre de duc de Normandie étant celui de Louis XVII
à sa naissance. Le comte de Richemont rejoignit Jeanne d’Arc à
Patay et contribua puissamment à bouter l’étranger hors de France
et à défendre le roi.
3)
Hébert (Henry) est une allusion au révolutionnaire Jacques
René Hébert, journaliste rédacteur du Père Duchesne et,
ce qu’on ne sait pas, agent royaliste, ainsi que l’a montré
Marina Grey dans sa biographie Hébert, Le père
Duchesne, agent royaliste. Le plan tortueux, mais
désintéressé de Jacques Hébert.et du maire de Paris, Pache,
consistait à rétablir l’ordre en créant un régent
durant la minorité de Louis XVII.
Même
les accusations d’ Hébert d’inceste contre la reine, p.246,
s’expliquent paradoxalement par le désir de sauver la reine en
soulevant l’indignation. Ainsi Robespierre dira à Saint-Just et
Barère: « Cet imbécile d’Hébert ! Ce n’est pas
assez qu’elle soit réellement une Messaline,il faut qu’il en
fasse encore une Agrippine et qu’il lui fournisse, à ses
derniers moments, un triomphe d’intérêt public ! ».
De même, Napoléon, informé par Sieyès qui le tenait de
Robespierre, évoquera à Sainte-Hélène le « plan
machiavélique d’Hébert », et dira qu’ Hébert, « ayant
fait une accusation aussi calomnieuse et aussi peu fondée (en
réalité, l’enfant avait eu un phimosis comme son père et sa mère
avait dû déplacer son prépuce), n’avait pour objet que de
provoquer le peuple à un soulèvement en faveur de cette princesse
en excitant son intérêt. » Jacques Hébert a fréquenté
Madame Atkyns : c’est grâce à Hébert que celle-ci verra une
deuxième et dernière fois la reine dans son cachot, guidée par
Hébert qui prend donc de grands risques.209. Hébert participe
ainsi au complot de l’œillet que Simon, son protégé
pourtant, fait échouer.P. 236
Il
donnera également au faux dauphin de Milan ce pseudonyme d’
Hébert.
Les
prénoms que Richemont s’est choisis sont Hector, Adalbert, et
Alfred.
1
Il a choisi le prénom d’Hector en l’honneur de son père
adoptif, le comte Charles Jean d’Hector (1722-1808). Dans
ses Mémoires d’un contemporain (1831) Richemont écrit qu’à
l’armée de Condé il « était accompagné d’un Mentor, comme le
fils d’Ulysse », et que celui-ci veillait sur lui, mais il
ne le nomme pas. Grâce à son dossier militaire conservé eaux
Archives de l’armée (dossier Fauste de Rémoville) , nous
apprenons qu’il avait fait à l’Armée des Princes la campagne
de Gand sous les ordres directs du Comte Hector, qui était
lieutenant général, et qu’il est resté auprès de cet
officier et passé en Angleterre de 1793 à 1801 en qualité d’aide
de camp de cet officier . Il restera neuf ans auprès de cet
officier en qualité d’aide de camp, participant à l’expédition
ratée de Quiberon. Le comte d’Hector meurt en exil à Reading en
Angleterrre le 18 août 1808.
Richemont rentre en France après le 19 septembre 1801, date à
partir de laquelle son dossier est vierge jusqu’en 1815. De plus,
dans une lettre du 10 juillet 1849 citée par J. Ducassé, le baron
fait une digression sur sa visite au tombeau d’Hector, le Troyen,
qui ne prend tout son sens que comme allusion à son père adoptif.
Marin, il s’embarque pour Smyrne, puis écrit :
« Je
voulus visiter Bournabalhi [aujourd’huii Canakhale en Turquie, qui
passait pour l’emplacement de Troie, avant que Schliemann ne le
déplace à Hissarlick], voisin de l’ancienne Troie ; je
retrouvai là tout ce qu’Homère a décrit. C’est avec cet
ouvrage à la main [l’Iliade] que je pus voir l’emplacement
de Troie, le Simoïsis [Simoïs], le Scamandre [Ghumbré], le mont
Ida, l’île de Cenedos [coquille pour Tenedos], la place du camp
des Grecs, la plage où fut laissé le fameux cheval de bois ,
le lieu du combat d’Hector et de Patrocle, celui [le lieu du
combat] d’Achille et [du fils ]de Priam [curieuse périphrase pour
désigner Hector], le camp de Diomède et enfin le tombeau d’Achille.
Je passai près de trois semaines à visiter ces lieux si célèbres
et je me rendis à Constantinople où j’arrivai dans les derniers
jours de janvier 1818. » Le futur baron de Richemont, après
avoir servi sur trois navires de guerre, était parti en 1791
rejoindre le corps royal de la marine qui est sous les ordres
directs du lieutenant général comte d’Hector.
2
Pour le prénom d’Adalbert choisi par le baron, il nous
faut rappeler que son père aspira au trône de Pologne et qu’il
est évoqué par le prénom Adalbert ou les formes dérivées
Estelberth, pour Adalbert . Adalbert , évêque de
Magdebourg, fonda la Pologne chrétienne, au trône de laquelle avait
aspiré le père du baron. . Mais le baron de Richemont s’identifie
plutôt à Adalbert de Prague qui durant neuf ans étudia
auprès de Adalbert de Magdebourg, comme lui-même fut durant
neuf ans aide de camp auprès du comte d’Hector. Il donnera à
son aide, le faux dauphin de Milan, le pseudonyme d’Henry Hébert.
.
3
Quant au prénom d’Alfred, c’est l’anagramme de
Adalbert, de Claude (de Marie-Claude Dailly, sa mère) et de François
(les prénoms de son père étaient Louis et François).
Refusant de servir Napoléon, le colonel Richemont émigre
outre-mer : on a sa trace au Brésil, à Rio de Janeiro
(déclaration du chanoine bibliothécaire de la cathédrale Saint
Jean-Baptiste), où il est précepteur des enfants du roi et gardien
de la bibliothèque des ouvrages en français : le fils de Dom
Juan VI l’accueille très bien. Il demeure au palais San
Christovacci. Il est expédié « à Goa, colonie
portugaise des Indes, où l’on trouve trace d’un « officier
étranger » qui s’est battu et a négocié une entente
provisoire avec l’évêque de Goa , rendant ses pouvoirs au
vice-roi des Indes, de 1807 à 1816 , par les moyens d’une habile
diplomatie », selon Madame Ducassé.
Les
Chevaliers de la Foi, une société secrète initiatique de la
Restauration.
Les
membres de la société secrète des Chevaliers de la Foi,
procédant de la Congrégation, hiérarchisée à l’exemple
de la franc-maçonnerie et étudiée par le Père Guillaume de
Bertier de Sauvigny, étaient des intégristes catholiques et le
baron de Richemont en fait partie. .C’est cette appartenance qui
permet au baron de Richemont d’être reçu en audience privée
par le pape à Gaëte ; c’est elle aussi qui explique que le
baron s’intéresse aux apparitions de la Salette. Le baron et ses
associés étaient gênés par ses yeux marron et non pas bleus
comme ceux du Dauphin qui les tenait peut-être de Marie- Antoinette.
Aussi ont-ils l’ingénuité de demander à Dieu un miracle pour
changer la couleur des yeux du baron. Houzelot , cité par Madame
Ducassé, op. cit, . p.177, écrit à l’abbé Veyron à
propos d’un pèlerinage à la Salette : « Il a été
convenu qu’une neuvaine sera faite à Notre Dame de la Salette pour
lui demander d’accorder trois choses à O (pseudonyme du baron) :
1)
qu’elle lui remette les yeux dans leur état naturel….
3)
qu’elle lui accorde également toutes les grâces nécessaires afin
qu’il puisse remplir la mission qui lui a été confiée.
P.
S. Quant au premier motif de la neuvaine, c’est entre nous Il
ne faut nullement parler des yeux à personne. Il faut expliquer le
premier motif de manière qu’il ne soit pas intelligible car
certains en tireraient un mauvais parti, ne comprenant pas qu’il y
a quelque chose de mystérieux dans ce phénomène » .Comme
le remarque Madame Ducassé, il y avait différents niveaux
d’initiation et seuls les plus élevés savaient que le baron, avec
ses yeux noirs, n’était pas Louis XVII ! Et dans une lettre
de Richemont de 1849 à la comtesse Henriette d’Apchier de Vabre
(née Corteilles de Vaurenard, op. cit,, p. 146, également
membre de la société secrète) : « Il est
fâcheux que les yeux noirs vous aient échappé. »
C’est pour une autre raison qu’il participe à la procession de
la Confrérie des Pénitents blancs au Bois d’Oingt –en-
Beaujolais du 4 au 10 octobre 1850. Il s’agit de la Confrérie
du Gonfalon destinée à racheter les esclaves blancs et
chrétiens faits par les musulmans, originellement dans les Etats
pontificaux et liée aux capucins (franciscains). Le baron avait,
au cours de sa vie mouvementée, été pris comme esclave, vendu dans
le grand marché d’esclaves d’Alep, et rapidement racheté par la
confrérie du Gonfalon. Mais son honneur l’a amené à passer sous
silence cette période, humiliante à ses yeux, de son existence.
« Arrivé
à Paris en août 1815, j’en partis en mai 1816. Je m’embarquai à
Marseille pour Gibraltar; de là pour Londres ; ensuite je
débarquai à Edimbourg où je trouvai Tancrède de Hauteville
(anagramme de Hervagault et de Grimaldi de Monaco, le
père naturel de Hervagault étant Honoré IV Grimaldi de Monaco, duc
de Valentinois), mon secrétaire, le même qui avait été
arrêté pour moi à Saint-Malo [Il est intéressant de voir ici
que le baron qui avait longuement étudié les archives du procès de
Rouen -sa région natale,- identifie , comme le font certains
historiens, Hervagault et Charles de Navarre, arrêté à
Saint-Malo et à qui fut substitué le sabotier Mathurin Bruneau :
Hervagault était un blondinet aux yeux bleus, d’allure très
efféminée…]… Partis de là [avec de Hauteville] pour le Cap de
Bonne Espérance, nous embarquâmes sur un bateau portugais qui
cinglait vers Ormuzd. En passant à Goa {où il est certain que le
colonel de Richemont a combattu pour les Portugais], Tancrède
y fut assassiné par des brigands. [Ce sont des pirates, qui, tandis
que le substitué Bruneau décède au Mont Saint Michel, tuent le
vrai Hervagault, peut-être en raison de ses mœurs et de son aspect
efféminés, et prennent le baron comme esclave.]
…Arrivé
à Ormus [les fers aux pieds], j’attendis l’arrivée de la
caravane des Indes et je partis avec elle pour le pèlerinage de la
Mecque, en passant par Bassora, Bagdad, Alep [où il est vendu
comme esclave ], Damas, où il est racheté et libéré
par les confrères du Gonfalon, Jerusalem et Suez. Remonté
jusqu’à Jérusalem, je quittai la caravane, changeai de costume et
entrai dans le Saint Sépulcre… »
La
rencontre avec un autre faux dauphin, la prison de Milan et le nom de
Hébert.
Le
dauphin en qui ont cru les gouvernements européens et dont le chemin
a croisé celui de Naundorff et surtout celui du baron de Richemont.
1
Le tambour du général autrichien Mélas (un blond aux yeux bleus
selon Silvio Pellico, aux yeux noirs selon un signalement suisse).
L’état-civil
du futur prisonnier de Milan et carbonaro : JeanLouis Dauphin,
Bourbon, Bourlon, Friedrich, Hébert etc.
Nous
avons dit que le baron de Richemont, alias le marquis de Bourbon
Conti, avait deux tombes : l’une, celle du baron de Richemont,
à Gleizé (Rhône), au château deVaurenard, chez Madame d’Apchier,
datant de 1853, et l’autre au Père Lachaise datant de 1832-1833
, où fut enterré , avec l’assentiment du baron de Richemont,
le faux dauphin en qui croyaient Fouché et Joséphine , ainsi que ,
peut-être, le baron de Richemont qui semble avoir porté beaucoup
d’affection à ce demi-frère qui portait le nom de Jean Louis
Bourbon .Il avait été emporté par une épidémie de
choléra qui sévit à Paris à cette époque. On a fait de
nombreuses hypothèses sur son identité : il pourrait avoir
été le fils adultérin (elle en eut au moins trois et,
curieusement, le Directoire la contraignit de les reconnaître) de
la femme de lettres parisienne Fanny de Beauharnais, née
Marie Anne Françoise ou Fanny Mouchard de Chaban (1737-1813),
épouse de Claude de Beauharnais, et du père du baron de Richemont,
le marquis de Bourbon-Conti, à en juger par les anagrammes
dont sont truffés ses pseudonymes. Parmi les nombreux amants de
Fanny de Beauharnais, il nous faut citer les hébertistes Michel de
Cubières et Mororo .Lorsque Jacques René Hébert sera guillotiné,
Fanny de Beauharnais sera inquiétée et devra quitter précipitamment
Paris. De là le nom d’Hébert que prendra le faux dauphin, car
Hébert était un agent royaliste, contrairement à ce qu’on croit.
Hébert , qui voulait instituer durant la minorité de Louis XVII un
grand juge , savoir lui-même ou le maire de paris Pache, tenta un
projet d’évasion du dauphin et eut besoin d’un garçon du même
âge pour faire illusion lorsque le dauphin serait exfiltré.
L’enfant qu’on projetait de substituer au dauphin était tout
trouvé : le fils du Prince de Bourbon et de Fanny de
Beauharnais, enfant qui avait été formé pour cela. On invita
celui-ci à entrer dans un cheval de carton que le cocher Ojardias
amena du logement de Simon dans la cour des écuries au Temple pour
opérer la substitution et l’y cacher, mais l’ordre final de
Hébert , inquiet pour sa propre sécurité, n’arriva pas. On a
deux témoignages crédibles de Voisin et de la veuve Ladrée qui ont
aperçu ce cheval de carton. Les témoignages sont cités par Marina
Grey dans Enquête sur la mort de Louis XVII, Le prince et le
savetier, p.108 dans le chapitre intitulé Le cheval de
carton.
Le
projet échoua, mais le garçonnet en garda le souvenir.
Vers
1800, Fouché, ministre de la police, vint trouver Napoléon
Bonaparte pour lui apprendre l’affaire dite du tambour de
Belgiojoso. Joséphine de Beauharnais, bien informée grâce à
sa grand- tante Fanny de Beauharnais et à Madame Campan,
intervient auprès de Fouché pour qu’il protège ce garçonnet de
14 ans qui avait été condamné pour une peccadille à un traitement
cruel, celui de passer trois fois par les baguettes, et qui, pour
tenter d’y échapper, avait déclaré à son colonel qu’il était
fils de Marie-Antoinette. Le colonel l’envoie à Turin et, en
chemin, à Asti, il est reconnu par un Suisse du château de
Versailles, ainsi que par diverses personnes qui avaient séjourné à
la cour de France, notamment, dit-on, à cause d’une cicatrice au
bas de la mâchoire gauche provenant de la morsure d’un lapin blanc
que le Prince élevait. Selon son récit, après être sorti du
temple dans un cheval de carton, il aurait été élevé par Madame
Fanny de Beauharnais, se serait rendu à Bordeaux, puis à Bastia où
il a appris l’italien. A la mort de son protecteur, il devient
garçon limonadier à Bastia. [Pour certains, ceci est un mensonge :
le cabaretier serait Simon Toussaint Charbonnier, originaire
de Craponne-sur-Arzon, près du Puy-en-Velay en Haute-Loire, où il
tient un cabaret. Il a déclaré « qu’il avait participé
à l’enlèvement de Louis XVII (plutôt du futur tambour de
Belgiojoso). Voir Michel Benoit, L’affaire Louis XVII, autopsie
d’un secret d’Etat. p.15l « Ce dernier aurait «été
caché dans la région d’Apinac », près de Montbrison dans
la Loire et non loin de Viverols près d’Ambert dans le Puy-de
–Dôme, plus exactement à Eglisolles. Les habitants
d’Eglisolles racontent qu’un garçon déguisé en fille a été
amené au lieu-dit La Grange chez les Chomette. Il reçoit le
prénom de Blaise et un autre« frère », Blaise (même
prénom) Chomette, né en avril 1797, prendra sa suite, devenant
voiturier comme Ojardias. Ojardias sera assassiné dans les
premières années de 1800 dans un étang à Viverols. La mort de son
protecteur n’est-elle pas celle de Genès Ojardias ? p.
105
Ojardias
pourrait être le voiturier qui déménagea les affaires de Simon,
des caisses et des paniers de linge, ceci se passant le 5 janvier
1794. Le déménagement de Simon, qui avait été révoqué par
Chaumette, a lieu en direction de son nouvel appartementh, au-dessus
des écuries, à l’angle ouest de l’Enclos, près des cuisines,
de la caserne et du cloître, aménagés pour des artisans Là
attendait le futur tambour de Belgiojoso destiné à le remplacer.
Pour une raison qu’on ignore, le plan a avorté et, tandis que le
Dauphin restait au temple, celui qui devait le remplacer prenait la
route de Viverols avec Ojardias. . Puis, de Viverols ], il s’enfuit
et cherche à gagner Vienne , mais il est enrôlé dès son arrivée
en Italie dans un régiment autrichien, juste avant Marengo (14 juin
1800).
L’enquête affirmera qu’il aurait été le fils d’un
militaire, français ou
suisse, horloger à ses
heures, appelé Dauphin, qu’il s’appelait Jean
-Louis Dauphin,dit Bourlon, en italien Giovanno- Ludovico
Delfino,. Selon Madame Ducassé, il serait né à Marcilly-le- Hayer
dans l’Aube près de Nogent-sur-Seine le 27 août 1786 et le
tambour de Mélas serait Jean-Louis Dauphin. Il aurait fait la
campagne d’Italie dans le 21e régiment d’infanterie
de ligne. Précisons que le patronyme de Dauphin vient d’un surnom
du Moyen Age signifiant gros, à cause de la taille du dauphin
confondu avec d’autres cétacés comme la baleine. Le comte
d’Albon, de Vienne, est surnommé le dauphin (le gros)
et donna son nom au Dauphiné, puis au fils du roi de France dont le
Dauphiné est l’apanage à sa naissance.
Ce
qui nous intéresse ici, c’est que Joséphine, sa tante Fanny de
Beauharnais et surtout Fouché a cru que Jean Louis Bourlon était
le dauphin évadé du Temple. Napoléon avait dit à Fouché de
le faire retenir dans un lieu secret pour ne pas alimenter la
curiosité ou l’espoir du peuple. Fouché aurait cherché à s’en
débarrasser, mais le prétendant lui échappe et regagne
l’Italie où, en 1810, le général Radet l’appréhende à Civita
Vecchia. Il est devenu alors carbonaro et gagne l’ancienne
Slovaquie et la Hongrie, qui faisaient partie de
l’Autriche.
Une
rencontre avec Werg- Naundorff
L’ancien tambour de Belgiojoso devient horloger grâce au
parrain que lui choisit Fouché ,
un dénommé Dauphin qui, lorsqu’il mourra, cèdera son rôle
à un franco-luxembourgeois
nommé Mondorff , et
il a pour compagnon un certain Karl Benjamin Werg,
de Halle, apprenti horloger avec lui chez Mondorff. .Werg
empruntera sa nationalité française et son nom de Bourbon à son
compagnon. Il avait pour compatriote à Halle Karl Willellm
Naundorff : il lui empruntera son nom afin d’échapper aux
recherches de la police pour son évasion d’un camp de prisonniers
des bandes de Schill et Brunswicg. , même si le nom de son maître,
Mondorff, l’a inspiré également. C’est sous le nom de Naundorff
que Werg prête serment, en 1812, comme bourgeois de Spandau et
c’est sous ce même nom de Naundorff qu’il exerce son activité
d’ horloger en 1827 à Brandebourg,
En
somme, selon moi,le chemin du pseudo- Naundorff, alias Werg, a
croisé celui du tambour de Belgiojoso , qui signait Louis Bourbon,
ce qui a donné à Naundorff l’idée de s’identifier à lui et
de se dire Louis XVII : à la prison de Brandebourg, il signe
Ludwig Burbong,alors qu’
en réalité son nom de baptême était Werg , protestant et
bourgeois. Nous avons, grâce aux recherches de Gerorges Pinet de
Manteyer à qui il faudra toujours revenir (Les faux Louis XVII,
le roman de Naundorff et la vie de Carl Werg, tiré de 700
pièces d’archives, 1926,2 volumes, plus de 1000 pages), la
trace de Werg dans les bandes de Schill et Brunswick, de sa
condamnation au bagne de Toulon (après laquelle seulement il prendra
le nom de Naundorff) et de son évasion. C’est au bagne de Toulon
que, se faisant passer pour le dauphin, il rencontre Claude Perrin,
né à Lagnieux le 31 décembre 1786, incorporé en 1806 dans le 3e
bataillon, 4e compagnie, condamné à la peine de 5 ans de
fers par le tribunal spécial de Bologne pour fabrication de faux
bons de pain .La police, lorsqu’elle trouve l’identité de
Perrin, la rapproche de celle de Richemont alors que c’est du
prétendant Naundorff qu’il aurait fallu la rapprocher. Claude
Perrin lui aussi s’évade du bagne, avec l’aide de son frère
Joseph. L’identité de Werg et de Naundorff est confirmée par
Naundorff lui-même, car il a raconté dans les termes que voici
ses aventures dans un récit dicté en 1824 au greffier du tribunal
de Brandebourg, récit certes égaré mais conservé par Otto Jork
(texte intégral de la seconde déclaration, dans Decaux, Louis
XVII retrouvé, Naudorff roi de France, p. 131) : « Une
nuit, je fus réveillé) [en France] par mon père nourricier
(
Mantorff ? )[altératon de Mondorff ] et je vins en Allemagne..
C’’est de lui qui, pour passer le temps, s’occupait
d’horlogerie, que j’appris ce métier. Après beaucoup de
détours, j’arrivai à la frontière de Bohême [en
Slovaquie] et j’entrai comme officier dans l’armée du duc de
Brunswick- Oels, qui avait obtenu connaissance de ma
condition.. En 1810, à la tête d’un détachement de 25 hommes, je
pris part à une escarmouche [contre les Français] près de Dresde,
et mes gens furent en partie tués, en partie faits prisonniers. Je
fus moi-même grièvement blessé et tombai en captivité. Les
troupes françaises m’escortèrent avec les autres prisonniers,
mais me laissèrent à Magdebourg, parce que j’avais une fièvre
nerveuse. Avant que je ne fusse complètement rétabli, on nous
embarqua pour la France [le bagne de Toulon]. Là je réussis avec un
certain Friedrich à m’échapper par un caveau qui se
trouvait dans une église où on nous avait mis pour nous
reposer. Nous allâmes alors tout droit à Berlin pour y entrer
dans l’armée comme hussards .A cause de ma qualité d’étranger
[de Français], je ne fus pas admis, mais le Président de la Police
Le Coq me permit de m’établir comme horloger et je m’établis
Schützenstrasse n°52..Un an après, j’allai à Spandau où je
séjournai jusqu’en 1822 Signé Ludwig Burbong »
Dans
une première déclaration, il avait déclaré qu’on lui avait volé
à Dresdes les titres établissant son identité et qu’il avait été
fait prisonnier par les Français.
Le
dénommé Friedrich pourrait être notre ancien tambour de
Belgiojoso.
L’ancien
tambour à Budapest en 1815
L’ancien
tambour aimait vagabonder : il quitte la Prusse pour la Hongrie
si bien que le 3-09-1815, on a l’acte de naissance d’une Marie
Antoinette de France , Marie Manczer, paroisse de Saint- Benoit de
Hron au nord de Budapest, ville de Erzergom. Dans les observations
en marge de l’acte, il est porté en latin : «le nom de
famille et le nom de baptême du père sont secrètement [recte
ne veut rien dire et doit être corrigé en secrete] ceux
de Louis Charles Bourbon, prince de la Couronne de la France
sauvée, selon les annotations secrètes des archives du
monastère forteresse (de Hron).»
Le
sort ultérieur de l’ancien tambour (1818-1824) sous le nom de
Bourlon ou de Bourbon à la prison de Milan.
Il a
été aperçu à Arles le 21 juillet 1819, à Marseille le 22 juillet
1819 (il y laisse ostensiblement un couteau marqué Louis XVII, puis
en Corse à Bastia à nouveau. Il se rend à Ancône, d’où il
prend la route de Parme en passant par Forli et Bologne. Il couche
dans le hameau de San Benedetto del Quercote, près de Bologne et le
12 avril 1818 y est arrêté, transféré le 25
août 1819 à Modène, puis à la prison de Milan où
Silvio Pellico l’apercevra. Ce dernier nous dit qu’il a des idées
anticléricales (ce ne peut donc être Richemont).
Dès 1818, Metternich dont dépendait la prison de Milan s’énerve
d’avoir à payer pour l’entretien d’un prisonnier à qui
l’Autriche n’a rien à reprocher .Aussi réclame-t-il avec
insistance que la France rembourse les frais et prenne en charge ce
prisonnier, menaçant de le libérer ! 34 lettres sont échangées
à son sujet. Voici qui ne fait pas les affaires de Louis XVIII. Le
23 mai 1823, Vienne reçoit du Ministère de l’Intérieur parisien
un avis avec dans la marge à gauche « Il est
extrêmement désirable que le gouvernement autrichien puisse garder
Bourlon le plus longtemps possible afin d’éviter à la France un
procès scandaleux » avec une information officieuse selon
laquelle Bourlon (adaptation
de l’italien burlone,
imposteur) était le vrai dauphin. Le marquis de
Nicolaï et l’abbé Perreau , cités par Mme J. Ducassé , op.
cit, p.208, avaient reçu séparément du Comte Bolza, intendant
général de la police de Lombardie,la confidence que le prisonnier
de Milan était le dauphin .A l’approche de la libération,
Richemont qui ignorait alors l’identité réelle de son demi-frère
reçut la mission de servir le roi en devenant prisonnier volontaire
à Milan de façon à pouvoir se substituer au tambour de Mélas
Voici qui explique pourquoi Louis XVIII ne lui a pas, le 29 avril
1824, délivré de lettres patentes constitutives de ses titres de
noblesse comme à son cadet puisqu’il le croyait prisonnier à
Milan.
Le
but de la mission secrète du baron
Le
prince, comme la Société secrète, était persuadé de l’évasion
, de la survivance de Louis XVII et de son identité avec le
Bourbon de Milan. Mais, pour eux, Louis XVII n’était qu’un
bâtard issu de Fersen et capable de l’ignominie d’accuser sa
mère d’attouchements sexuels. Richemont devait donc l’éliminer
du trône, sans le tuer, de façon à assurer la sécurité du trône
de Louis XVIII, puis de Charles X et éventuellement du Comte de
Chambord. Le baron de Richemont est naturellement très opposé à
Louis - Philippe, « l’infâme régicide », comme il
l’appelle, par allusion à son père qui avait voté la mort
de Louis XVI.
Richemont
lui aussi a cru au début, à cause des yeux bleus entre autres, que
le prisonnier de Milan était le vrai dauphin. Les ordres étaient
de le neutraliser à son inévitable libération de prison. Pour
cela, une solution consistait à se faire emprisonner lui-même à
Milan, mais une seconde consistait , plus humainement , à capter la
confiance du carbonaro et à lui donner de nouveaux ordres. C’est
la seconde solution que, selon moi, choisit Richemont, faisant jouer
pour la rencontre et la libération du carbonaro son cousinage avec
le duc d’Este- Modène , -ce qui lui permet peut-être d’apprendre
de lui qu’il n n’est pas le dauphin, malgré ses yeux bleus.. .
Au procès de Richemont où sont convoqués Silvio Pellico et le
Français Andryane en tant que témoins de ce qui s’est passé à
la prison de Milan où ils ont tous deux été emprisonnés,
Andryane déclare [Madame Ducassé , op. cit. , p.127] :
« L’accusé [Richemont] donne des détails qui ne peuvent
avoir été connus que d’un prisonnier ».A quoi l’avocat
général réplique : « Ou d’un homme qui les
tiendrait d’un prisonnier et qui aurait intérêt à bien les
connaître…. » Andryane réplique : « Non,
Messieurs, il faut avoir été là, renfermé dans le local, et ma
conviction que l’accusé est le prisonnier de Milan est pleine et
entière (profonde sensation). »Mais nous croyons qu’il se
trompe.
Sous
le nom d’Hébert, qu’il donnera ensuite au prisonnier de Milan,
le baron s’installe à Toulon d’où il écrit à Milan à
l’ancien tambour de Belgiojoso. Selon Madame Ducassé, op. cit.
p.79, dans le dossier de Milan, se trouve une lettre de Bourlon
(l’ancien tambour) à Rastouin,un tanneur chez qui loge le baron à
Toulon, où il dit qu’à sa libération il se retirera à Toulon.
A sa libération en 1824, il s’est rallié au baron et, devenu
aussi Henry Hébert, apparaît le 5 décembre 1825, maigre et
fatigué, à Genève à l’arrivée de la diligence de Milan Le
baron y a pris le nom de M. Julienne, hôtelier. . L’ex-prisonnier
se rend à Toulon comme annoncé, puis à Rouen.
Le
Bourlon emprisonné à Milan, savoir Giovanno- Ludovico
Delfino, avait aussi comme pseudonyme Aldo Cardoni.
Explication
de toutes ces anagrammes du prisonnier de Milan
Bourlon
vient entre autres de l’italien burlone, farceur,
mystificateur, cf burlesque
et le mot est paronymique de Bourbon.
On
retrouvera les lettres de carbonaro, Delfino ou Dauphin,
Ludovico (Louis) et Jean dans les trois pseudonymes
anagrammatiques de l’ancien tambour de Belgiojoso, Aldo Cardoni,
Bourlon, Henry Hébert.
Pour
Bourlon, outre la paronymie évidente avec
Bourbon, on retrouve le b et le on ro
de carbonaro
(comme pour onro dans Cardoni) et le l de
Ludovico ainsi que le u.
Aldo
Cardoni est l’anagramme
de carbonaro, membre d’une société secrète puissante en
France comme en Italie, visant à l’unité italienne et hostile au
pape à cause de ses Etats Pontificaux notamment. Le double d
est pris à Delfino , ou Dauphin, et à
Ludovico. Dans Aldo Cardoni
le 2e do et le l de Ludovico sont
aussi utilisés.
Quant
à Henry Hébert, dont le baron de Richemont s’était aussi
servi à partir de Adalbert, nous y retrouvons le b , le
n et le r de carbonaro ; le
e, le n, le i (=j) de Henri sont
peut-être pris à Jean .
Le
carbonaro et le baron de Richemont se confondent souvent, sous le
pseudonyme de Henry Hébert, dans l’affaire du procès de Rouen et
surtout à Toulon, initiés tous deux dans des loges.La différence
de couleur d’yeux dans les signalements ne semble pas être
déterminante, ayant pu être modifiée.
1
Toulon et les loges maçonniques.
Henry
Hébert (Adalbert), de Genève, passe par Ferney et
se dirige vers Toulon où les amis francs-maçons du baron
l’accueillent. Puis il accompagne le baron en Normandie où il
monte une verrerie qui fait faillite.
Dans sa région natale, le baron consulte les archives des procès
des deux faux dauphins, Charles de Navarre et Hervagault. En
1828, le baron se rend à Paris et fait paraître en 1831 deux
ouvrages, éditeur Labreli de Fontaine., imprimeur David Boucher
[Lemaistre], les Mémoires du duc de Normandie.Au Luxembourg
le baron fait paraître une proclamation qui est saisie. Il voyage
à Besançon, en Belgique, aux Pays-Bas.
Mais
il s’est aussi installé à Toulon où il loge chez un
tanneur, Rastouin. .Il obtient le 32e degré d’une loge
maçonnique, les Vrais amis d’Egypte, qui succède à une
loge militaire et qui ne relève pas du Grand orient, mais d’une
société secrète initiatique, les Chevaliers de la Foi localement
appelée Ordre des Aga (dignitaires
égyptiens) ou Ordre de Toulon. .Il fait
admettre aussi son compère le carbonaro dans deux autres loges
toulonnaises, la Réunion de Toulon et les Sept Ecossais
Réunis, cette dernière dépendant du Grand Orient parisien.
2
Rouen et le procès du baron de Richemont
La
déclaration de Lasne, op. cit. p .128
M.
Lasne, peintre en bâtiment, est
appelé à déposer
: « J’ai
été préposé à la garde du
dauphin en fructidor an III (est-ce une erreur pour le 31
mars 1795, soit le 11 germinal ? Fructidor donnerait le mois de
septembre. ). J’ai
remplacé Laurent [celui-ci,
le 29 mars 1795, quitte le Temple] qui
laissait l’enfant dans l’abandon le plus complet
et dans un état de saleté extraordinaire. L’enfant tomba malade
[le 6 mai, il était tuberculeux]. Je demandai un médecin. Le
système (régime) du médecin a duré huit jours ; au bout de
ce temps [Ier juin], ce médecin (Desault] est mort (le 13 floréal).
M. Pelletan fut appelé [le 5 juin] ; on suivit le même régime
et l’enfant est mort dans mes bras au bout de quelques jours.[le 8
juin].
Le
Président : Avez-vous causé avec l’enfant ?
Lasne :
Tous les jours.
Le
Président : Sur quels objets ?
-Lasne :
Jamais que sur des sujets sérieux et graves. Ces conversations ont
laissé des souvenirs profonds chez moi. Jamais il n’entamait la
conversation. Il avait beaucoup d’intelligence ; je
surprendrais l’auditoire si je voulais dire ce qu’il disait. Je
le promenais tous les matins sur la terrasse et je le tenais par le
bras parce qu’il avait une tumeur au genou gauche. Il fallait
monter trois étages pour le voir après être passé par un poste de
30 hommes.
Le
Président : On prétend (le romancier Regnault) que c’était
un enfant changé et qu’on a apporté l’enfant que vous soigniez
dans un cheval de carton dans lequel on avait remporté l’autre.
Lasne :
Tout cela est un système de faux. J’avais été à même de
connaître le dauphin ; j’étais soldat dans les gardes
françaises à la 4e compagnie. Je fus nommé
capitaine et quand je montais aux Tuileries, j’apercevais M. le
Dauphin. »
Lasne a accepté que madame Atkyns voie l’enfant contre argent,
puis a reçu de l’argent pour le faire évader. Grâce à
l’inventaire de sa succession (op.
cit., p. 144, note32)
Etude XXVIII, 17 août 1841, nous savons qu’il possédait de
nombreuses montres en or et des kilos d’argenterie qui ont
été inventoriés (op. cit. , p.
144, note 32), ce qui
surprend pour un peintre en bâtiment qui fut aussi gardien au
Temple. Mais il renonça à le faire évader à cause de son état
peut-être : il était au 3e étage, il devait passer
devant un poste de 30 hommes. En tout cas il garda l’argent de
Madame Atkyns.
La
rencontre du baron de Richemont et de Madame Atkyns,
op. cit. p.138
Madame
Atkyns ayant vu l’enfant roi au Temple voulut voir aussi le baron
de Richemont, ce qui ne faisait pas les affaires de celui-ci. Il prit
une attitude froide et réservée au cours de la rencontre et il
essaya plus tard de la justifier dans une lettre à Madame
Atkyns : la présence « d’Ems », un
indicateur de police, aux côtés de Madame Atkyns, l’oblige,
prétend-il, à la réserve « C’est assez pour me
forcer à une réserve que j’eusse bannie loin de moi dès les
premiers jours (du procès) , puisque je retrouvais en vous une
connaissance de plus de 40 ans ; que je ne pouvais voir que la
femme généreuse qui n’a pas craint d’exposer sa vie pour
sauver celle de mon infortunée reine et mère ; qui a fait
d’énormes sacrifices pour m’arracher moi-même des mains de mes
farouches bourreaux… , qui, me croyant en prison (à
Milan,ce qui prouve qu’il n’y était pas !) en 1818,
voulait m’en arracher, à quelque prix que ce fût ; qui,
enfin, me retrouvant dans les fers (en 1834, à Sainte- Pélagie,
après le procès de Rouen), n’a pas craint de tout braver pour
arriver jusqu’à moi. Pourquoi m’avez-vous trouvé si réservé,
quoique nous nous fussions mutuellement bien reconnus (allusion à
leur entrevue- imaginaire- au Temple) ? »
L’évasion
du baron
Grâce
entre autres à l’ancien tambour de Belgiojoso, le
baron s’évade à quatre pattes dans un tunnel qui menait dans un
quartier désert : les arènes de Lutèce.
Le
cimetière Sainte-Marguerite (voir Philippe Delorme,
Louis XVII, La vérité, Sa mort au temple confirmée par la
science, 2000).
C’est
là que les restes du Dauphin furent transportés dans la fosse
commune. En 1816, Louis XVIII entreprit une recherche afin de
transférer les reliques dans la basilique royale de Saint-Denis,
mais il l’abandonna, persuadé qu’elle n’offrait aucune
certitude. L’enquête alors menée est intéressante. Elle est
racontée par B. Chantelauze dans Les derniers chapitres de mon
Louis XVII, découverte des ossements du Dauphin en 1846 dans le
cimetière Sainte-Marguerite, 1887, plaquette de 76 pages. On
interrogea notamment la veuve du fossoyeur Pierre Betrancourt
, surnommé Valentin , qui avait enterré dans un cercueil de sapin
le petit prince et un ami intime du fossoyeur, nommé Decouflet,
bedeau de la paroisse des Quinze-Vingts., mais sans pouvoir retrouver
à l’époque Lasne, « le plus important des
témoins »..La veuve Betrancourt indiqua que , peut-être la
troisième nuit suivant l’inhumation, son mari retira le corps du
petit prince de la fosse commune et le transféra , toujours dans sa
bière de sapin, dans une fosse creusée « partie dans
le mur de fondation, partie dans le cimetière, à gauche de
la la porte de l’église, du côté de l’autel de la communion,
mais que son mari ne lui avait pas montré au juste l’endroit.
»
Un
seul homme pouvait leur donner, dit-elle, des renseignements plus
précis, le sieur Decouflet. Celui-ci leur raconta qu’en
1802 Bertrancourt, en creusant environ deux pieds en terre le long
du pilastre gauche de la porte de l’église en entrant par le
cimetière, mit à découvert une pierre du mur de fondation…
et lui fit remarquer à la surface une croix de deux à trois pouces
sculptée au marteau. »
« Tu
vois cet endroit ?lui dit-il en exigeant le plus grand secret,
on y fera quelque jour un monument, car il y a dessous le cercueil
du Dauphin. » Il ajouta qu’il avait l’avait retiré de la
fosse commune et l’avait mis en sûreté en ce lieu. »
Les commissaires de Louis XVIII préférèrent se fier à la veuve du
fossoyeur et en 1846 c’est là, « partie dans le mur
de fondation, partie dans le cimetière, à gauche de la porte de
l’église, du côté de l’autel de la communion », que
fut trouvé le cadavre présumé de Louis XVII jusqu’aux analyses
de 1979 qui démontrèrent le contraire.
En
1837, l’abbé Raynaud, vicaire de Sainte-Marguerite depuis 1803,
révèle , dans une lettre à Beauchesne, que Betrancourt avait
recherché la bière nuitamment : pour mieux la reconnaître, il
avait soulevé une des planches du cercueil mal cloué,( donc
un cercueil en bois) et avait vu la tête d’un enfant dont le crâne
avait été scié(mais il devait y en avoir beaucoup d’autres dans
cette fosse commune). Il creuse une fosse sous la porte du
cimetière donnant dans la chapelle de Saint-Vincent-de –Paul et
y enfouit la bière du jeune prince, après avoir formé, sur la
planche supérieure de cette bière, une croix de Malte avec
des lattes.
Voici
la version de Pelletan, vers 1815, venant
de Betrancourt, op. cit. p.143 : «
à droite, auprès de la petite porte qui donne dans l’église,
sous une avance que formait une des pierres de fondation du pilier de
l’église voisine. Un tiers du cercueil était sous cette pierre,
et le reste, couvert de terre, à une assez grande profondeur :
on y avait même placé une petite croix. »
Après
les fouilles de 1846, les restes furent enterrés derrière la
Chapelle des Ames du purgatoire, près de la tombe de M. Dubois,
l’ancien curé de Sainte Marguerite.
En
1979, les docteurs Huard et Grnek, sous la direction du docteur
Pierre Thillaud, analysèrent les restes présumés du squelette de
Louis XVI trouvés en ce dernier lieu et en conclurent qu’il ne
s’agissait ni de l’enfant mort au Temple ni non plus de celui
qui fut autopsié, confirmant les doutes de Louis XVIII et ceux d’un
des médecins qui avait procédé à l’examen de 1846. Le docteur
Thillaud conclut : « les chances de retrouver un jour
les restes du corps de louis XVII sont pratiquement nulles. »
Qu’en déduire ? La femme de Betrancourt s’est trompée.
Mais en 1800, le général d’Andigné alors prisonnier a u Temple
écrit dans ses Mémoires, cités, P. 180, par Marina Grey
dans Enquête sur la mort de Louis XVII, que ses
compagnons creusèrent dans le fond
du fossé dans la cour
du Temple afin de trouver de la bonne terre et de faire un
jardin. Ils aperçurent « le corps d’un grand enfant qui
avait été enterré dans de la chaux vive. Un corps isolé, enseveli
danscelieu, et avec des précautions aussi inusitées, nous donna
àpenser que nous avions trouvé les restes de Monseigneur le
Dauphin, mort dans la tour du Temple.Les chairs étaient e ntièrement
détruites, il ne restait plus que le squelette.Un de nous détacha
un petit os qu’il désira conserver comme une relique.Le corps fut
recouvert respectueusement et nous évitâmes d’en approcher
davantage.Fauconnier(le gardien) se trouvait là au moment où
j’allais visiter le squelette. :
« C’est
là, nécessairement, monsieur, lui dis-je, le corps de Monseigneur
le Dauphin ? »
Il
parut un peu embarrassé de ma question, mais répondit sans
hésiter :
« Oui,
Monsieur. »
Ceci
est confirmé par une note du policier Senar, confiée au baron de
Batz et transmise par celui-cià l’historien Eckard : «(Louis
XVII) n’a été ni tué ni déporté… On avait caché le
cadavre, près d’une tour, en terre. »
Il
est peu probable qu’on puisse retrouver l’endroit, étant donné
les modifications faites en 1979 sous les auspices de la commission
du Vieux Paris.
L’ADN
du cœur du dauphin autopsié au Temple
Le
seul espoir consiste donc dans les restes de l’autopsie :
quelques mèches de cheveux blonds données par Pelletan à Damont,
officier municipal présent à l’autopsie (op.cit, p. 117)
sous promesse d’en recevoir lui-même la moitié (que Pelletan
offrit ensuite à la duchesse d’Angoulême) et se trouvant
aujourd’hui à Pontoise (op. cit, p.115), op. cit.,
p . 136, ainsi qu’une tache de sang du dauphin provenant de
l’autopsie sur l’original du PV de l’autopsie. Mais c’est
surtout le cœur du dauphin, subtilisé lors de l’autopsie par le
docteur Pelletan et conservé par lui dans une urne de cristal, qui
« peut parler ». En 2000, le professeur Cassiman op.cit
(p. 94). analyse un échantillon du cœur et le compare à l’ADN
mitochondrial de mèches de cheveux de Marie-Antoinette et de ses
deux sœurs. Une variante dans la séquence de l’ADN du cœur,
retrouvée précédemment aussi chez Anne de Roumanie (sang), et chez
son frère, André de Bourbon -Parme (cheveux) renforce encore la
probabilité que le cœur est bien celui du dauphin. .C’est ainsi
que l’ADN du cœur du dauphin, malgré ses tribulations, a pu être
comparé avec l’ADN d’une mèche de cheveux de sa mère et
confirmer leur parenté. L’ADN de Naundorff a été analysé
lui aussi et n’a présenté aucune parenté avec celui des
Bourbons. Renan disait : « A quoi bon tant chercher la
vérité ? A la fin, la vérité est peut-être triste. »
Paul Griscelli
Paul Griscelli
Votre raisonnement pour Ernestine LAMBRIQUET ne colle pas. En effet vous dites qu'Ernestine est morte en 1813 à Paris. Elle ne peut avoir été la Duchesse d'Angoulême morte en 1851.
RépondreSupprimerPar ailleurs vous dites que l'ancien tambour ( Bourlon ou Bourbon) est arrêté à San Benedetto près de Bologne le 12/4/1818 et qu'il est aperçu à Arles le 21/7/1819 et à Marseille le 22/7/1819 alors qu'il est transféré le 25/8/1819 à Modène .S'il est arrêté le 12/4/1818 comment expliquez-vous la période partant du 13/4//1818 au 24/8/1819 où il est libre apparemment?
Tout cela est bien intéressant, mais où sont les témoignages des personnes qui ont reconnu formellement Louis XVII, dans le baron de Richemont (plus de 150) ?
RépondreSupprimerComment expliquez-vous qu'un homme ait pu naître et mourir SANS IDENTITÉ ? Pour nous, la case est toujours froide !
Franck Peyrot